Intense était l’émotion lorsque le moudjahid Lakhdar Bakraoui, dernier survivant de la bataille de K’sar de Mélika, à Ghardaïa le vendredi 6 octobre 1961, a franchi le seuil du lieu où s’est déroulé l’accrochage armé 64 ans après.
Ainsi, l’accrochage a eu lieu entre une poignée de Moudjahidine face à une armée coloniale surarmée. Ce jour-là, l’officier Ahmed Taleb tombe au champ d’honneur, alors que Lakhdar Bakraoui et ses quatre autres frères d’armes, le lieutenant Saïd Abbadou, le sous-lieutenant Lâabed Zeroual, le caporal Moussa Souilem, et le djoundi Mohamed Lazrag, blessés, ont été fait prisonniers.
Les autorités au rendez-vous
En effet, ce lundi 6 octobre 2025, cela fait 64 ans que l’« épopée » de K’sar de Mélika, a eu lieu. À cette occasion, les autorités locales civiles et militaires, ainsi que la « famille révolutionnaire », ont organisé une cérémonie commémorative.
Accompagné du wali de Ghardaïa, Abdellah Abi Nouar, du président de l’association nationale des invalides de la guerre de libération nationale, du secrétaire de l’organisation nationale des moudjahidines (ONM) de la wilaya de Ghardaïa, le Moudjahid Mohamed Souilem, le dernier survivant rescapé de cette épopée, l’ex-Djoundi de l’Armée de Libération Nationale (ALN), Lakhdar Bakraoui est revenu sur les lieux de cette bataille qui est restée vivante dans la mémoire collective de la population locale.
Une épopée mémorable
Evoquant cette bataille, un fils de Chahid bien connu de la région de Metlili, berceau de la grande tribu des Châambas, rappelle que c’est « un acte de bravoure et de don de soi que seuls ceux convaincus du bien-fondé de leurs actions sont en mesure d’en faire le sacrifice suprême». Il ajoute que « nos valeureux Moudjahidines, guidés par leur foi et la ferme volonté d’arracher l’indépendance, ont tout donné pour la libération du pays et c’est à eux qu’on doit aujourd’hui de vivre libres sur la terre de nos aïeux ». Selon le narratif du dernier acteur vivant de cette épopée, « cette bataille du 6 octobre 1961 au cœur du K’sar Mélika, dite bataille Benlatreche, a été un haut fait d’armes dans l’histoire de la révolution de notre pays », s’est-il souvenu.
L’Officier Ahmed Taleb aux commandes
Dépêché par le commandant de la wilaya VI Historique, le colonel Mohamed Chaâbani, l’officier Ahmed Taleb s’était rendu, en compagnie de ses cinq compagnons d’armes dans la région pour éveiller la conscience des citoyens sur les velléités coloniales de séparer le sud du nord et de s’accaparer des immenses richesses de notre Sahara.
« Toute cette opération a été planifiée et conduite par six Moudjahidine sous le commandement de l’officier Sid Ahmed Taleb, en compagnie du lieutenant Saïd Abbadou, du sous-lieutenant Lâabed Zeroual et du caporal Moussa Souilem, ainsi que des Djoundis Lakhdar Bakraoui et Mohamed Lazrag », se souvient-il.
Le valeureux moudjahid précise que « cette bataille a été la suite logique de la grande bataille d’Afrane, menée le 28 août 1957 dans la région de Metlili, à 45 km au sud de Ghardaïa, qui a été le premier affrontement, dans la région, entre les Moudjahidine et les forces coloniales ».
Des combats d’une rare intensités
Durant cette même bataille, sont tombés en martyrs Mokhtar Rouibah, Abdallah Othmani, issus de la région de Guerrara, Mohamed Berrghayed et Bouras, de la région de Metlili, et Hakoum Belekehal d’El-Ménéa. « Les affrontements armés avec les forces coloniales se sont enchaînés avec les accrochages à El-Atteuf, le 25 octobre 1957, et à Djebel-Boulâama, le 3 décembre 1959, près de la région de Sebseb, à 65 km au sud de Ghardaïa ».
Toujours selon les témoignages du Moudjahid Lakhdar Bakraoui, l’action de ce groupe de moudjahidine a été entamée depuis la région de Guerrara, à 120 km au nord-est de Ghardaïa. Elle consistait en l’organisation des Moussabiline et Fedayine et leur sensibilisation à la lutte armée, avant de rallier la région de Ghardaïa, complètement assiégée par des barrages dressés par l’armée coloniale pour barrer la route aux Moudjahidine.
Ahmed Taleb tombe avec les honneurs !
Malheureusement, le groupe a été repéré. Une campagne de recherche a été enclenchée par les forces coloniales. « Les six Moudjahidine, accompagnés par Bakir Abou El-Hassane se sont réfugiés chez Hadji Zelahbi, habitant du Ksar Melika, au lieu-dit Benlatreche, surplombant la ville de Ghardaïa », se remémore le survivant.
Localisés et encerclés par l’armée coloniale, les moudjahidine ont vite procédé à l’incinération de tous les documents en leur possession, avant d’aller se réfugier dans une cave de la mosquée Malékite du K’sar de Mélika. « Le vendredi 6 octobre 1961, les forces coloniales ont lancé dans la cave une bombe lacrymogène pour les faire sortir de leur cachette. Immédiatement, les Moudjahidine ont riposté par des tirs nourris éliminant sur le coup deux soldats français, déclenchant ainsi le début d’un accrochage qui a fait plusieurs morts et blessés dans les rangs de l’ennemi et la mort du Lieutenant Ahmed Taleb alors que ses compagnons d’armes, gravement blessés, ont été faits prisonniers.»
C’était il y a soixante-quatre (64) ans, un 6 octobre de l’année 1961…

