Le nouveau projet de loi portant révision du code de la route, instruit par le président de la République Abdelmadjid Tebboune et récemment déposé à l’Assemblée populaire nationale, marque une refonte profonde d’un texte devenu insuffisant face à l’ampleur du drame routier en Algérie.
Ainsi, composé de 190 articles, le projet répond à une priorité nationale : réduire des accidents de la circulation qui provoquent chaque année des milliers de victimes humaines et d’importants dégâts matériels.
Selon l’exposé des motifs, cette révision vise à moderniser les règles encadrant l’organisation, la sécurité et la police de la circulation routière, en améliorant notamment la qualité du transport à travers toutes les régions du pays.
Le «rôle clé» des collectivités locales
En effet, le texte renforce en premier lieu la politique nationale de sécurité routière, avec un accent particulier sur la collecte et le traitement des données d’accidentalité et sur l’amélioration durable des comportements des usagers.
Il introduit également une définition précise de plusieurs notions et établit les règles d’utilisation des voies publiques, de contrôle du trafic routier et d’organisation du transport. Compte tenu de leur rôle central, les collectivités locales seront désormais chargées d’élaborer et de mettre en œuvre les plans de circulation afin de maîtriser l’expansion continue du trafic automobile et d’en réduire les effets négatifs.
Le projet encadre aussi les obligations des conducteurs, des piétons et des professionnels du transport collectif, du taxi, du transport scolaire, du transport de marchandises et du transport de matières dangereuses, en plus des règles relatives à l’arrêt, au stationnement, aux dépassements et aux priorités de passage.
Une stratégie « synchronisée »
La prévention des accidents en Algérie, occupe une place majeure dans le projet. L’État se voit confier la mission d’élaborer et de promouvoir une stratégie nationale de sécurité routière, tandis que les collectivités locales devront décliner cette stratégie à l’échelle territoriale, en tenant compte des risques propres à chaque région.
La société civile, le secteur privé et les médias seront étroitement associés à l’élaboration et à l’application de ces plans. Un cadre institutionnel renforcé est également prévu, avec la création d’un Conseil national de prévention et de sécurité routières, chargé de définir la stratégie nationale, d’évaluer les actions menées et d’émettre des décisions obligatoires pour l’ensemble des acteurs du domaine.
La Délégation nationale à la sécurité routière est maintenue dans son rôle de structure de proposition et d’accompagnement technique.
Entre prévention et sensibilisation
Afin de lutter contre les « points noirs » et les zones dangereuses, le projet de loi prévoit la mise en place d’une cellule locale de veille et d’intervention dans chaque commune.
Placée auprès du président de l’APC, cette structure sera chargée de repérer les zones accidentogènes, d’intervenir immédiatement pour écarter les dangers et d’alerter les autorités compétentes lorsque nécessaire. Le texte institue également une journée nationale de la sécurité routière, célébrée chaque année à la date de publication de la loi au Journal officiel, afin de sensibiliser durablement les citoyens.
Permis de conduire : période probatoire et normes strictes
Le projet introduit une période probatoire de deux ans pour tout nouveau titulaire du permis de conduire, une mesure qui s’ajoute à un renforcement du contrôle des capacités des conducteurs. Le texte fixe aussi les normes techniques auxquelles les véhicules doivent répondre en matière de sûreté, de sécurité et de protection de l’environnement.
Frapper directement au porte-monnaie
La réforme revoit en profondeur la classification des infractions routières en distinguant contraventions, délits et crimes. Les contraventions sont désormais réparties en quatre catégories assorties de sanctions financières sévères.
Les délits et crimes sont définis de manière détaillée et passibles de peines pouvant atteindre 20 ans de réclusion criminelle et 2.000.000 DA d’amende. Les sanctions sont aggravées en cas d’homicide ou de blessures involontaires impliquant des véhicules de transport collectif, de transport scolaire, de taxis, de poids lourds, de transport de marchandises ou de matières dangereuses.
Nouvelle incrimination : la mise en danger d’autrui
Le texte introduit de nouvelles infractions, notamment l’incrimination explicite de la mise en danger de la vie ou de l’intégrité physique d’autrui.
La responsabilité pénale est également élargie à d’autres intervenants : agences de contrôle technique, experts des mines, écoles de conduite, inspecteurs du permis, organismes de formation professionnelle, ainsi que les entreprises chargées de la réalisation, de l’aménagement ou de la maintenance des routes lorsque leur négligence contribue à un accident. Le texte criminalise aussi la fabrication, l’importation ou la vente de pièces de rechange frauduleuses pouvant entraîner des accidents.
Lutte renforcée contre la consommation de stupéfiants au volant
Considérant l’ampleur du phénomène, le projet de loi durcit les mesures liées à la consommation de stupéfiants et de substances psychotropes. Des tests médicaux attestant de la non-consommation seront exigés lors de la demande ou du renouvellement du permis de conduire.
Les conducteurs pourront être soumis à des examens médicaux périodiques obligatoires, voire à des tests inopinés. Les dossiers de recrutement des conducteurs de poids lourds, taxis, transport scolaire, transport collectif ou transport de matières dangereuses devront comporter des analyses médicales prouvant l’absence de consommation de drogues ou de psychotropes.
Suspension, annulation et contrôle médical des conducteurs
Le projet détaille également les cas de suspension ou d’annulation du permis de conduire, ainsi que les dispositions relatives à la récidive et à la confiscation du véhicule.
Des peines complémentaires sont prévues, notamment la possibilité d’ordonner un examen médical pour vérifier l’aptitude physique et mentale du conducteur à la conduite automobile.

