Il y a de cela soixante sept ans que le colonel Ali Mellah dit Si Chérif est tombé au champ d’honneur. Comme chaque année, à cette occasion, des hommages lui sont rendus.
Des dizaines de personnes de la famille révolutionnaire dont plusieurs enfants de Moudjahidine et de Chahid et des citoyens ont déposé des fleurs tout d’abord au niveau du mémorial dédié en son nom au chef-lieu de la daira de Tizi-Gheniff au sud de Tizi-Ouzou, puis au chef-lieu lieu de la commune de M’Kira devant la stèle érigée à son effigie ainsi que devant le piédestal de l’autre stèle à Imlikchen.
Son parcours hors norme a été revisité au musée du Moudjahid de Medouha à Tizi-Ouzou.
Un héros oublié de la République !
Il est vrai que son nom est gravé sur le fronton d’un lycée et d’une mosquée au centre ville de Draâ El-Mizan, chef-lieu de sa commune de naissance, et aussi au marché de la place du premier Ali Mellah. Cependant, de grandes institutions au niveau national ne portent pas encore son nom. A quand cette reconnaissance ?, se demande-t-on. D’ailleurs, dans leurs interventions, de nombreuses personnes estiment qu’ au regard de son parcours unique en son genre, le nom de Si Chérif mérite d’être porté par exemple par une université où un aéroport.
Les massacres du mai 1945: Le déclic !
Ali Mellah est né le 14 février à Taka, dans le douar de M’Kira, aârch d’Imkiren, commune mixte de Draâ El-Mizan. Il tomba arme à la main le 31 mars 1957 à Oued Bedj, douar Haidouna, Djebel Chaoun, commune Tarek Ben Ziad , dans l’actuelle daira de Miliana dans une embuscade qui lui aurait été tendue par ses frères de combat.
Très jeune, il avait en tête cette idée de libérer l’Algérie du joug colonial tout comme de nombreux jeunes hommes de son âge. Les évènements sanglants du huit mai 1945 ont nourri en lui son militantisme et son patriotisme si bien qu’il adhéra au PPA de sa localité au sein de la kasma de M’Kira avant d’activer dans l’Organisation secrète ( O.S) dès 1947.
D’ailleurs, il participa à la campagne électorale au profit de mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques ( MTLD). Eu vent de cette nouvelle, la police française le rechercha activement dans la région. Il porta alors un pseudonyme, Mohamed Lebdiri, pour échapper à cette trousse.
De prof à redoutable chef de guerre…
Entre 1948 et 1949 , il enseigna à Ain Bessam dans l’actuelle wilaya de Bouira.Ce qui le contraignit à quitter la région pour se réfugier dans d’autres localités de la Kabylie. C’est alors qu’entre 1951 et 1952, il fut désigné à la tête du mouvement des Ouadhias. Successivement, il devint responsable des dairas de Tigzirt et d’Azazga.
En 1953, le futur colonel de la wilaya VI historique fournit des armes aux militants pour préparer le déclenchement de la révolution. Son compagnon Ahmed Kasmi avait déclaré lors d’un hommage qui lui a été rendu qu’à la veille du premier novembre 1954 lui et Ali Mellah s’étaient déplacés en bus à Tizi-Ouzou et lorsqu’ils étaient arrivés au pont de l’Oued Sebaou, un barrage de gendarmerie obligea le car de s’arrêter pour vérification de papiers d’identité.
« J’ai remarqué tout de suite que mon compagnon s’était volatilisé et une autre personne avait occupé sa place. C’était pour moi une chose étrange. Le soir, il a réapparu pour récupérer son cabas rempli d’armes », s’était-il rappelé.
Un devin? Non, un fin visionnaire!
La veille du premier novembre, ce héros était à Azazga pour participer au déclenchement de la révolution. Ali Mellah fut blessé lors d’une opération visant le commissariat et la mairie de la ville. Il fuyait à Timizart où il reçut des soins.
Durant le mois de novembre, il prépara de nombreuses opérations coup de poing notamment à Tigzirt où son groupe avait tué quatorze militaires. Devant ses soldats à Timizart, il déclara : » la révolution sera difficile et elle durera plus de cinq ans mais elle n’atteindra pas dix ans ». À l’indépendance, des années d’instabilité caractériseront le pays ». C’est pour cela qu’on disait de lui qu’il était un visionnaire.
L' »ange gardien » du Congrès de la Soummam
D’année en année, il occupa plusieurs postes de responsabilité. Ses faits d’armes se poursuivaient. En janvier 1955, il récupéra un lot d’armes à Ain El Hammam lors d’un accrochage à Tizi L’Djemaâ. Il assura l’intérim d’Amar Driss à Tizi-Ouzou où il a failli être arrêté en compagnie de Amar Ouamrane et de Fernane Hanafi.
Eu égard à son intelligence et à sa stratégie, il échappa plusieurs fois aux perquisitions des services français. On raconte qu’en juin 1956, il quitta sa région à la tête d’un groupe de 200 djounouds en direction de la vallée de la Soummam pour participer aux préparatifs et sécuriser le congrès prévu à Ifri en août 1956.
Il joua un rôle prépondérant pour réussir ce conclave aux côtés d’autres dirigeants de la révolution à l’image de Amar Ouamrane, de Salah Zamoum, de Slimane Dehiles et de Amara Rachid dans la région d’Ouzana ( Blida).
Des galons amplement mérités !
Dans cette région, il réussit de nombreuses opérations contre l’ennemi notamment à Oued Djenane et Dechmia en juin 1956 qui causèrent de grandes pertes humaines à l’armée coloniale.
Il devrait assister au congrès de la Soummam comme représentant du sud du pays. Cependant, en cours de route vers Ifri, une urgence signalée dans son secteur l’obligea à rebrousser chemin.
C’est durant cet extraordinaire Congrès que le sud du pays fut promu en wilaya 6 historique dont le chef ne fût que Si Chérif et au cours de ce conclave qu’Ali Mellah fut nommé hcolonel de l’Armée de libération nationale ( ALN) et membre du Conseil National de la Révolution Algérienne ( CNRA). Dans cette vaste région wilaya du pays, ce chef réussit une organisation parfaite en coordonnant toutes les zones.
Ces traîtres qui…
Toujours, selon des témoignages de Moudjahidine, on apprend que le colonel Ali Mellah a été tué par ses pairs pour lesquels il avait avait pleine confiance. Il fut assassiné le 31 mars 1957 aux environs par un membre de l’ALN, dit-on, activant au profit de l’armée coloniale.
De son vivant , son fils Amar disait toujours que son père qu’il n’avait vu que rarement était tombé dans un traquenard. « C’était un assassinat « , disait-il.
La nouvelle de sa disparition dramatique avait touché les héros de la révolution tels Amar Ouamrane , Krim Belkacem , Abane Ramdane et bien d’autres. Il fut réinhumé en 1985 au carré des martyrs d’El Alia ( Alger). C’est dire que ce stratège militaire avait inscrit son nom en lettres d’or dans la quête de la libération de l’Algérie.
A.O