Désormais, confirmé à son poste de Premier ministre par le président Tebboune M. Sifi Ghrieb, aura la lourde tâche de former un gouvernement à la hauteur des aspirations et des attentes du chef de l’État et à même d’exécuter à la lettre les orientations et directives du président Tebboune.
Ainsi et plus concrètement le futur gouvernent Sifi Ghrieb devra éviter un attelage qui pourrait ressembler, globalement, à ces staffs hétérogènes qui ont présidé à l’exécution du programme du président, depuis 2019, de Djerad jusqu’à Larbaoui en passant par Aymene Benabderrahmane. Des équipes sans cohésion avec des chefs sans autorité qu’elles ont de l’être liftées à plusieurs reprises.
Résultats en demi-teinte
Le résultat peut se mesurer au mécontentement populaire, les tensions, les pénuries injustifiées, les fluctuations anormales des prix des produits alimentaires et la dérégulation du marché, l’incapacité criante des ministres à résoudre le moindre problème comme la perturbation de l’alimentation en eau potable, la disponibilité de produits de large consommation pourtant subventionnés, la rupture du lien entre la base, les wilayas et le gouvernement qui s’est traduite souvent par des limogeages ou de sévères recadrages.
Des ministres « hors champ »
Ce qui a d’ailleurs motivé bien quelquefois les coups de gueule du président de la République que ce soit avec les walis mais surtout avec les ministres, notamment lors de la réunion de leur conseil qu’il préside. C’était le cas, à titre d’exemple du ministre de l’Éducation qui, après bien des rounds de négociation avec les partenaires sociaux, a élaboré un statut particulier des enseignants que même le président a rejeté.
L’ancien ministre de la Communication a également vu son projet de loi sur la presse écrite, électronique et audiovisuel renvoyé pour enrichissement. C’était valable aussi pour les manquements sanctionnés des walis de Tiaret, de Relizane ou encore celui d’Oran rabroué par le président Tebboune à cause de son esprit « bulldozer » et ses méthodes radicales et inhumaines. Et jusqu’à cette tragédie d’oued El Harrach qui a révélé d’autres défaillances subjacentes ignorées par les ministres et les responsables et provoquées par d’absurdes décisions.
Dysfonctionnement structurel
Abdelmadjid Tebboune s’est ainsi retrouvé à la conception, l’exécution et au suivi de ses projets. Il est à la fois derrière l’ingénierie et à la mise en œuvre, pour utiliser une terminologie technique. Et les ministres trouvaient un malin plaisir à tout adosser au président de la république avec cet inusable refrain : « ce sont les orientations du président de la république ».
Lorsqu’il leur arrive de sortir de leurs bureaux pour des visites où le protocole efface l’évocation des projets et des attentes de la société. Il est d’ailleurs remarquable qu’une partie des ministres demeure inconnue du grand public. Parce qu’ils sont effacés, invisibles…
Un large déficit qu’essaye souvent de combler le président Tebboune à travers des visites dans les wilayas, ses décisions directes et ses instructions. Même la diplomatie n’a pas échappé à ce constat au point où le président a été contraint de nommer deux ministres délégués pur soutenir le ministre des Affaires étrangères alors que lui-même se charge de l’architecture de celle-ci. Pour y remédier, le président a tenté plusieurs formules pour composer une équipe efficace, aucune recette n’a pris selon ses vœux.
Limites d’un gouvernement de technocrates
Entre autres raisons des résultats mitigés de l’action gouvernementale, la forte présence des technocrates, notamment d’anciens walis promus ministres, dans la composition des gouvernements successifs au moment où la situation exigeait des gouvernements de compétences, politiques ou d’union nationale.
La conjoncture économique et la situation géopolitique internationale, les besoins de développement du pays invitent à revoir les critères d’éligibilité aux postes de ministres dans un exécutif appelé à être offensif sur tous les fronts. Des politiques, des compétences et des techniciens, précisément. Ce qui pourrait, à bien des égards, expliquer le retard mis pour l’annonce de la nomination du nouveau chef de gouvernement.
Une « task force » pour Tebboune
La nomination d’un nouveau gouvernement est plus plausible étant donné l’immensité des projets en chantier et les défis auxquels fait face le pays. Ce qui suppose, sans doute, de larges consultations autour des dossiers et des objectifs avec des compétences, des universitaires, des opérateurs économiques, d’anciens ministres reconnus pour leurs compétences en matière de gestion, pour constituer un bloc solide autour d’un premier chef qui impose la cohésion, la discipline et la rigueur dans l’approche et la réalisation des projets. Le nombre de portefeuilles peut également se voir réduit pour éliminer les inutiles double-fonctions, par souci d’économie et d’efficacité.
Le président pourra bien repêcher quelques têtes du gouvernement actuel qui ont fait leurs preuves dans leurs départements. Ils ne seraient cependant pas nombreux à pouvoir survivre à cet indispensable changement que pourrait opérer le président Tebboune.
