Après le projet du South2Corridor, où l’Algérie est déjà destinée pour être sa « rampe de lancement », un autre projet tout aussi ambitieux est entrain de se mettre en place et le pays pourrait très bien tirer son épingle du jeu et affirmer davantage son ambition de devenir un « hub » des énergies renouvelables, notamment l’hydrogène vert.
Ainsi, parmi les initiatives les plus ambitieuses pour décarboner l’Europe, un projet se détache par sa portée continentale et ses promesses concrètes : SunsHyne, un nouveau corridor d’hydrogène vert reliant l’Afrique du Nord aux poumons industriels européens. Et dans ce ballet énergétique de demain, l’Algérie semble en pôle position.
Un axe Afrique-Europe en gestation
Fruit d’une alliance entre cinq grands opérateurs européens de gazoducs — Snam (Italie), TAG (Autriche), Eustream (Slovaquie), Net4Gas (Tchéquie) et OGE (Allemagne) — le projet SunsHyne vient de franchir un jalon déterminant. En août dernier, une étude de faisabilité technique et commerciale a confirmé la viabilité de ce corridor transcontinental, long de 3 400 kilomètres, capable de transporter jusqu’à 5 millions de tonnes d’hydrogène vert par an.Objectif : connecter les zones de production à fort potentiel solaire d’Afrique du Nord aux marchés à forte demande énergétique d’Europe centrale et occidentale, notamment l’Allemagne, où les besoins en hydrogène devraient exploser à l’horizon 2030 — dépassant les 100 TWh annuels.
L’Algérie, trait d’union naturel entre deux continents
Si les promoteurs du projet restent discrets sur les terminaux exacts de départ côté africain, l’Algérie se distingue clairement comme le maillon le plus stratégique de la chaîne. Déjà interconnectée à l’Italie via le gazoduc TransMed, la puissance maghrébine pourrait rapidement convertir cet avantage en hub régional de l’hydrogène vert.Son potentiel solaire colossal, ses infrastructures gazières existantes et son expertise en exportation énergétique en font un candidat naturel à la tête du Corridor SunsHyne. À cela s’ajoute une position géographique idéale pour irriguer la Sicile, porte d’entrée européenne du projet.
Un couloir hybride, à majorité réaffecté
L’une des forces du projet réside dans son pragmatisme : près de 85 % du tracé utilisera des gazoducs existants, reconvertis pour transporter de l’hydrogène. Moins de nouvelles infrastructures à construire, donc, pour un déploiement plus rapide et un impact environnemental réduit. Le calendrier est clair : la mise en service est prévue avant la fin de la décennie, avec une montée en puissance progressive. L’Italie, l’Autriche, la Slovaquie, la République tchèque et l’Allemagne forment le tronc principal du corridor, autour duquel se grefferont les réseaux de transport nationaux.
Un projet structurant pour un marché européen de l’hydrogène
Par ailleurs et au-delà de la logistique, SunsHyne incarne une vision politique et économique : celle d’un marché européen intégré de l’hydrogène, où les interconnexions joueront un rôle clé dans la sécurité d’approvisionnement et la transition énergétique. Un responsable de Net4Gas l’affirme sans détour : « SunsHyne apportera une diversification stratégique des sources d’énergie et renforcera l’autonomie du continent ». Dans cette dynamique, l’intégration potentielle du couloir SunsHyne avec le projet SoutH2 — également en lien avec l’Algérie — ouvre la voie à un réseau maillé, résilient et compétitif.
L’Afrique du Nord dans le jeu mondial de l’énergie propre
Enfin, avec le Corridor SunsHyne, l’Algérie se place au cœur de la reconfiguration énergétique du Vieux Continent. Au-delà des enjeux climatiques, c’est une opportunité géostratégique majeure : se repositionner comme fournisseur indispensable d’une énergie propre, durable et à haute valeur ajoutée. À l’heure où l’Europe cherche à tourner la page des hydrocarbures russes, le Sahara algérien, baigné de soleil, pourrait bien devenir le nouveau gisement vert du XXIe siècle.