La Banque d’Algérie franchit un nouveau cap dans sa lutte contre l’économie informelle et les flux financiers opaques.
Ainsi, dans une note adressée ce dimanche aux établissements bancaires, l’institution monétaire annonce un durcissement significatif des règles encadrant l’alimentation des comptes commerciaux, en limitant drastiquement les dépôts en espèces.
Est-ce la fin du cash ?
En effet, datée du 22 décembre 2025, la note n°02/DGIG/2025, émanant de la Direction générale de l’inspection générale de la Banque d’Algérie, impose désormais que les comptes commerciaux soient approvisionnés exclusivement par des moyens de paiement scripturaux, tels que les virements et les chèques. Les versements en liquide ne seront tolérés qu’à titre exceptionnel, et uniquement lorsqu’ils sont « dûment justifiés ».
Pour la banque centrale, le constat est sans appel : « Compte tenu du niveau de risque élevé associé aux dépôts en espèces », l’usage du cash constitue un vecteur majeur de vulnérabilité pour le système financier, notamment en matière de blanchiment d’argent et de financement d’activités illicites.
Une surveillance renforcée et ciblée
Au-delà de la restriction du cash, la Banque d’Algérie insiste sur une approche plus fine et plus rigoureuse de la relation client. Les banques sont ainsi appelées à veiller à ce que « les opérations de la clientèle soient en adéquation avec le profil du client et cohérentes avec les informations que la banque détient à son sujet ».
Une manière de renforcer le principe de connaissance du client (KYC) et de détecter plus efficacement les comportements suspects. Cette orientation s’inscrit dans une stratégie plus large de sécurisation du système bancaire, appuyée par une batterie de textes réglementaires anti-blanchiment récemment adoptés ou renforcés.
Un arsenal réglementaire mobilisé
La note rappelle notamment l’obligation d’appliquer rigoureusement le règlement n°24-03 du 24 juillet 2024 relatif à la prévention et à la lutte contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et celui de la prolifération des armes de destruction massive. Elle fait également référence à l’instruction n°03-24 du 24 novembre 2024 portant sur le devoir de vigilance, ainsi qu’aux lignes directrices n°02-2025 de la Commission bancaire, publiées le 26 mai 2025.
Pour autant, la Banque d’Algérie se veut rassurante et précise que ces exigences accrues ne doivent pas se transformer en frein à l’inclusion financière. « Les mesures de vigilance prises dans ce cadre ne doivent pas constituer un écueil pour l’inclusion financière des clients présentant des risques plus faibles », souligne le document.
Une volonté affichée, un défi de terrain
À travers ces mesures, la Banque d’Algérie affiche clairement sa volonté de réduire la place du cash, considéré comme le carburant principal de l’économie parallèle, et de renforcer le contrôle des flux financiers. Les banques sont d’ailleurs invitées à appliquer ces dispositions sans délai.
Reste toutefois une réalité difficile à ignorer : dans l’économie algérienne, une grande partie des transactions — commerciales comme quotidiennes — continue de s’effectuer en espèces. Si l’objectif de moralisation et de transparence est largement salué, sa mise en œuvre gagnera sans doute à être progressive, afin d’accompagner les opérateurs économiques et les citoyens vers des pratiques plus formelles, sans provoquer de blocages dans un système où le cash demeure, pour l’instant, omniprésent, et ce, eu égard aux défaillances et couacs constatés dans certains systèmes de paiement et de transactions en ligne.

