La durabilité des ressources en eau et sécurité hydrique, une affaire de tous. C’est le message que universitaires et chercheurs ont voulu faire passer lors des journées scientifiques sur « la sécurité hydrique et résilience climatique en Algérie », organisées récemment à l’École Nationale Polytechnique d’Oran, Maurice Audin.
Ainsi, l’université est plus que jamais sollicitée et impliquée face à la menace du stress hydrique qui pèse sur notre pays, à l’instar des autres, pour relever les défis en matière de gestion des ressources en eau par la proposition de solutions innovantes et efficaces, et par l’affirmation de son engagement à cette démarche.
L’université en précurseur
En effet, l’urgence climatique a mis tous les voyants en rouge, ont affirmé les intervenants à cette rencontre. Pour le Pr Bouabdesselam Hassiba, chef de projet de pôle d’excellence dessalement, « il est primordial d’assurer une sécurité et une souveraineté hydrique face à l’urgence climatique. Cette souveraineté hydrique repose essentiellement sur le dessalement des eaux pour la population côtière ».
Selon cette universitaire, « la connaissance scientifique est au service du citoyen et doit contribuer à améliorer ses conditions de vie ». Cependant, si le dessalement des eaux est la solution préconisée pour limiter le stress hydrique, ce procédé est, d’une part, énergivore et, d’autre part, génère une production de saumure dont la gestion est un défi environnemental important.
Le Pr Bouabdesselam a expliqué sur ce point : « le rôle de l’université est d’essayer d’optimiser la consommation énergétique et de valoriser cette saumure qui, pour l’instant, n’a pas d’impact négatif sur la faune et la flore du fait que cette saumure est diluée ».
Les membranes de dessalement, un enjeu stratégique
L’autre problème qui représente un défi pour l’université et la recherche scientifique est celui des membranes de dessalement utilisées en osmose inverse. Il s’agit de matériaux semi-perméables qui permettent de séparer l’eau des sels et autres impuretés lors du processus de dessalement. Le coût de ces membranes utilisées dans une seule usine de dessalement se chiffre en millions de dollars. Un investissement qui pèse lourd sur le budget de l’État, en plus du coût des membranes remplacées après usage.
Le défi de l’université est donc de préserver ces membranes plus longtemps et de prolonger leur durée de vie, et pourquoi pas, souligne le Pr Bouabdesselam, les produire localement en Algérie. « Il s’agit de souveraineté car sans membrane, c’est tout le système de dessalement qui est à l’arrêt », insiste-t-il.
C’est dans ce cadre que des études ont été effectuées à l’École Polytechnique d’Oran par l’enseignante-chercheuse Mme Benyahia Khadidja, du département de génie de procédé, ayant pour objectif de protéger les membranes d’osmose inverse et d’assurer la durabilité du procédé de dessalement.
Les étudiants du Polytech’ d’Oran s’impliquent
Les études menées ont été axées sur l’optimisation du procédé de prétraitement, permettant de prolonger la durée de vie des membranes de deux ans. Il s’agissait notamment de trouver une solution au colmatage des membranes, en remplaçant les filtres à sable par de nouveaux filtres étudiés, les filtralites, et en ayant recours à des techniques membranaires comme la microfiltration.
Dans une démarche écologique, Mme Benyahia a également travaillé sur la réutilisation des membranes d’osmose inverse via un traitement chimique en laboratoire. Cette technique consiste à enlever la couche active colmatée et à réutiliser la membrane usée pour d’autres usages, comme l’épuration et le traitement des eaux usées.
Industrie et l’agriculture : Dangereuse gourmandise…
Les recherches universitaires ont démontré clairement que les industries et l’agriculture sont les secteurs les plus consommateurs d’eau. Si des campagnes de sensibilisation sont souvent dirigées vers les ménages pour limiter le gaspillage de cette ressource précieuse, un autre chantier scientifique s’impose, selon le Pr Mihoubi Mustapha Kamel, enseignant-chercheur à l’École Nationale Supérieure d’Hydraulique.
Il propose l’utilisation de techniques intelligentes et économes, notamment l’économie circulaire, pour améliorer la gestion de l’eau dans ces secteurs. Pour ce faire, il insiste sur l’importance de l’empreinte hydrique, un élément-clé pour garantir la durabilité des ressources. Le calcul de l’empreinte hydrique permet aux décideurs et aux pouvoirs publics de prendre les bonnes décisions au bon moment, affirme-t-il.
Le problème de l’eau, selon le Pr Mihoubi, est transversal : il concerne le ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, de l’Éducation, des Affaires Religieuses, de l’Environnement. Il est donc temps de réfléchir à l’élaboration d’une charte nationale de l’économie d’eau, afin d’en assurer la durabilité et, par conséquent, la sécurit