Ce qui se murmurait en coulisses vient d’être confirmé. Un rapport du Sénat français, publié le 24 septembre 2025, met en évidence une réalité troublante : les Algériens figurent parmi les ressortissants les plus discriminés dans l’obtention des visas pour la France.
Ainsi, les chiffres révèlent un écart frappant par rapport à la moyenne nationale et à la situation des pays voisins, soulevant des interrogations sur l’équité de la politique consulaire française.
Des taux de refus anormalement élevés
En effet, selon le document élaboré par les sénateurs Nathalie Goulet et Rémy Féraud pour la Commission des finances, le taux de refus des visas pour les ressortissants algériens a atteint 34,8 % en 2024, soit plus du double du taux national français, établi à 16,8 %. À titre de comparaison, la Tunisie affiche un taux de refus de 21,2 %, tandis que le Maroc ne dépasse pas 12,5 %. Ces écarts traduisent, selon les auteurs du rapport, une « inégalité de traitement » manifeste entre pays du Maghreb.
Malgré tout, l’Algérie reste parmi les principaux bénéficiaires
En dépit de ces obstacles, l’Algérie figure toujours parmi les dix premières nationalités bénéficiaires de visas français. Ce paradoxe s’explique par les liens humains, historiques et sociaux qui unissent les deux pays, mais aussi par la forte présence de la diaspora algérienne en France, composée de binationaux et de résidents légaux.
D’ailleurs, les chiffres sont révélateurs : 250.095 visas ont été délivrés par les trois consulats français en Algérie en 2024. En tenant compte du taux de refus, 383.680 dossiers ont été déposés, dont 133.548 ont été rejetés. Une politique jugée incohérente et peu équitable par les rédacteurs du rapport, car les décisions paraissent sélectives plutôt que fondées sur des critères objectifs et uniformes.
Une stigmatisation injuste autour de la « fraude documentaire »
Le rapport sénatorial classe l’Algérie au deuxième rang mondial après l’Inde pour les cas de « fraude documentaire » liés aux demandes de visa, avec 7448 dossiers contenant des pièces jugées falsifiées en 2024, et six cas de fausses identités. Plusieurs observateurs dénoncent une catégorisation stigmatisante, qui occulte les réalités socio-économiques du pays et les failles du système de traitement des visas lui-même, souvent sous-traité à des entreprises privées.
Capago, de nouveaux centres de traitement de visas
Dans ce sillage, le rapport révèle également que la société Capago, chargée de la collecte des dossiers de visa, prévoit d’ouvrir de nouveaux centres en Algérie, doublant ainsi ses effectifs. Cette expansion illustre l’ampleur d’un marché lucratif, où le visa devient une source de profits considérables pour les prestataires privés. Pendant ce temps, le citoyen algérien demeure le grand perdant, confronté à des procédures longues, coûteuses et souvent humiliantes, sans garantie de résultat favorable.
Des partenariats sans impact réel
L’étude mentionne également 93 accords de partenariat signés par l’ambassade de France à Alger avec des institutions locales, tandis que le consulat d’Oran en compte 48. Ces initiatives, censées faciliter le traitement administratif, n’ont toutefois ni réduit les délais, ni fait baisser le taux de refus. Elles confirment, bien au contraire, la complexité d’un système alourdi par la bureaucratie, loin des principes de transparence et d’efficacité.
Dix recommandations pour une politique plus juste
Pour tenter de rétablir l’équilibre, le rapport sénatorial propose dix recommandations, parmi lesquelles figure :
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- Mutualiser certaines missions consulaires entre États membres de l’espace Schengen pour réduire les coûts et améliorer la gestion ;
- [ ] Accélérer la numérisation de la plateforme France Visas pour fluidifier la circulation des informations ;
- [ ] Lutter contre la revente illégale de rendez-vous en instaurant un système automatisé et transparent ;
- [ ] Simplifier les recours administratifs, confiés exclusivement au ministère de l’Intérieur ;
- [ ] Mieux accompagner les étudiants et les talents étrangers, en adaptant les calendriers universitaires aux délais de traitement.