Depuis près d’un an, le marché algérien du pneumatique est confronté à une crise persistante, malgré des mesures d’urgence mises en place par les autorités.
Loin de se résorber, la pénurie ou littéralement la crise du pneu s’aggrave et affecte directement la mobilité des citoyens, le pouvoir d’achat des ménages et la sécurité des automobilistes.
Ainsi et à l’heure où certaines références deviennent introuvables et que les prix explosent, les appels à des solutions durables se multiplient, notamment de la part des organisations de défense des consommateurs.
Une crise structurelle malgré les mesures d’urgence
En effet, à l’automne 2024, les autorités algériennes avaient annoncé l’injection de 100 000 pneus importés et un programme élargi visant à introduire 300 000 unités sur le marché, dans le but de contenir la flambée des prix.
Cependant, près d’un an plus tard, ces efforts restent insuffisants : les tensions sur les prix persistent, et certaines tailles de pneus – notamment les petites dimensions destinées aux citadines – sont toujours introuvables.
La raison principale ? Une offre locale limitée et peu diversifiée. Iris Tyres, basé à Sétif, demeure le seul fabricant national en activité, avec une gamme qui couvre environ 60 références sur les 250 à 300 nécessaires au marché. Et si des projets d’extension ont été annoncés, visant une production annuelle de 4 millions de pneus tourisme et 800 000 pneus poids lourds à partir de fin 2025, ces capacités supplémentaires ne pourront à elles seules résoudre la crise actuelle.
Entre flambée des prix et spéculation
Les prix sur le marché de détail échappent à tout encadrement réel. Selon Mustapha Zebdi, président de l’Association APOCE, la spéculation est l’un des principaux facteurs de la hausse. L’absence de mécanismes de régulation ou de transparence sur les prix alimente la confusion, et les écarts entre les tarifs officiels et ceux pratiqués sur le terrain ne cessent de se creuser.
Cette situation a des conséquences très concrètes : les automobilistes se retrouvent contraints de retarder le remplacement de pneus usés, d’opter pour des tailles inadaptées ou de recourir à des produits douteux, souvent importés de manière informelle.
Un danger direct pour la sécurité routière
Rouler avec des pneus usés, mal dimensionnés ou de qualité incertaine met gravement en danger la vie des conducteurs et des passagers. Experts en sécurité routière et autorités s’accordent à dire que ces pratiques augmentent considérablement les risques d’accident : distances de freinage allongées, perte d’adhérence, risque de crevaison ou d’éclatement.
La pénurie devient ainsi bien plus qu’une problématique économique, c’est un enjeu de sécurité publique majeur.
Dans ce contexte alarmant, l’Organisation Algérienne de Défense du Consommateur HIMAYATEC a publié un communiqué ferme et urgent. Elle y demande :
- L’ouverture immédiate et réglementée de l’importation de pneus, en privilégiant les produits conformes aux normes de qualité et de sécurité.
- La protection du pouvoir d’achat, en permettant une baisse des prix via une offre renforcée.
- La protection des vies humaines, en réduisant le recours à des pneus défectueux ou non conformes.
« Les pneus ne sont pas un simple produit, mais un élément de sécurité essentiel. Tout retard dans la prise de décision menace directement la sécurité routière », alerte l’organisation, rappelant que la vie des consommateurs doit passer avant toute autre considération.
Des pistes pour sortir de l’impasse
Pour résoudre durablement la crise, plusieurs leviers doivent être activés :
- Augmenter la production locale, tout en élargissant la gamme de dimensions disponibles.
- Encourager une importation ciblée et encadrée, pour pallier les lacunes critiques de l’offre.
- Mettre en place des mécanismes de traçabilité et de régulation des prix, en particulier pour les tailles les plus demandées.
- Créer un canal de distribution encadré pour les références critiques, afin de limiter la spéculation et garantir l’approvisionnement des usagers.
La pénurie de pneus en Algérie est aujourd’hui un symbole des déséquilibres structurels du marché, mais aussi un signal d’alarme pour la sécurité routière. Sans une action rapide et coordonnée entre autorités, industriels et défenseurs des consommateurs, les files d’attente et les prix délirants ne feront qu’empirer – au détriment des automobilistes et de la sécurité de tous.