Par L. Kachemad
Le ministre espagnol des Affaires étrangères, de l’Union Européenne et de la Coopération, José Manuel Albares, est attendu ce lundi 12 février. Une information donnée par plusieurs médias ibériques, dont le site exteriores et confirmée ensuite par le département de M. Albares.
Cette visite diplomatique, initiée par le ministre des Affaires étrangères Ahmed Attaf, signe-t-elle la fin d’une bisbille entre les deux États, qui ont été de tous temps de proches partenaires ?
Une « lubie » aux graves conséquences pour l’Espagne
C’est en tous cas les premiers signes avant-coureurs, bien que poussives, d’une reprise progressive des relations Algéro – Espagnoles qui ont connues des moments difficiles pour les deux pays, lors de la crise qui a assombrie les relations des deux pays suite à la décision, prise en mars 2022, par le gouvernement de Pedro Sanchez de soutenir le plan d’autonomie marocain dans le règlement du conflit du Sahara Occidental.
Une décision, laquelle avait provoqué l’ire de l’Algérie qui a décidé, dans un premier temps de rappeler, le 19 mars 2022, son ambassadeur à Madrid et deux mois et demi, plus tard, de suspendre le traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération conclu le 8 octobre 2022 entre le Royaume d’Espagne et l’Algérie. Ce qui a, par ricochet, déteint gravement sur les relations commerciales entre les deux pays mettant un frein aux échanges commerciaux gelés sine die par l’Algérie.
Ce gel a gravement affecté la balance commerciale du Royaume d’Espagne qui a vu ses exportations vers l’Algérie complètement suspendues, alors que le royaume était classé comme le quatrième client de l’Algérie, après le Chine, la France et l’Italie, avec un volume de pas moins de 3 milliards d’euros par an.
Le « déclic » Daghmoum
Ce n’est que récemment, après une crise qui aura duré près de 20 mois, que les premiers signes avant-coureurs d’un processus de normalisation sont apparus, notamment après la nomination, le 17 novembre 2023, d’Abdelfattah Daghmoum, en qualité de nouvel ambassadeur d’Algérie auprès du royaume d’Espagne qui a depuis été accrédité par le Royaume d’Espagne et pris ses fonctions au siège de l’ambassade d’Algérie à Madrid, rue du Général Oraa .
Cette nomination a été suivie immédiatement par les premiers efforts de dégel, concrétisés deux mois plus tard, notamment sur le plan commercial, par la levée de l’interdiction de l’importation des produits avicoles espagnols. Décision confirmée, le 14 janvier, par une note de l’association algérienne des banques et des établissements financiers (ABEF) et saluée par le président du Conseil d’affaires algéro-espagnol, Djamel Bou Abdallah qui a confirmé que « le dégel des échanges commerciaux entre l’Algérie et l’Espagne s’opère de manière graduelle ».
Quand le commerce annonce la couleur
La levée de l’interdiction de l’importation des produits avicoles espagnols est une bonne nouvelle pour la filière avicole en Algérie, qui a souffert de cette rupture depuis mars 2022, dont l’impact sur les prix du poulet et des œufs a été fulgurant, impactant durement les bourses des ménages algériens. Nul doute que l’importation, et donc de la disponibilité, quantitative et qualitative, des intrants avicoles aura un effet boule de neige sur le prix des produits (poulet et œuf) qui devront connaître une bien sensible baisse des prix.
Pour ce qui est de l’autre nœud gordien commercial entre les deux pays, et pas des moindres, en l’occurrence la Gaz, après une crise multiforme entre les deux pays, conséquence de l’alignement de l’Espagne de Pedro Sanchez sur les thèses marocaines concernant le conflit du Sahara Occidental, l’Algérie a repris sa place de premier fournisseur de gaz au Royaume Espagnol, devant les États Unis d’Amérique, la Russie et le Qatar, alors que l’ancien gazoduc Maghreb-Europe qui desservait l’Espagne , en transitant par la Maroc , a été fermé fin 2021 , au plus fort de la crise entre Alger et Rabat.
Sonatrach ou « la force tranquille »
C’est ce moment précis qu’avait choisi le gouvernement espagnol pour changer de position sur la question du Sahara Occidental engendrant de vives tensions diplomatiques avec Alger ce qui a amené la Sonatrach à revoir le prix du gaz fourni à l’Espagne, tandis que les tensions diplomatiques avec Madrid se sont intensifiées, lorsque le gouvernement espagnol a changé de position sur le Sahara occidental, conduisant la Sonatrach algérienne à revoir les prix du gaz.
Il convient de rappeler qu’en novembre 2021, Sonatrach et son partenaire espagnol Naturgy avaient convenu de réviser les prix des contrats de fourniture de gaz à long terme existants à la lumière de l’évolution du marché. D’après des rapports de presse, le groupe Sonatrach et son partenaire espagnol Naturgy seraient parvenus à finaliser un accord sur le prix du gaz pour 2023 et 2024. Fin octobre, la presse espagnole a révélé que l’Espagne payait le gaz algérien trois fois plus cher qu’en 2021 et demeure quand même le premier client pour le gaz algérien.
C’est, notamment, sur ces dossiers tant commerciaux que politique, qui ont empoisonnait les relations algéro- espagnols durant près de deux ans, que vont se pencher les deux ministres des affaires étrangères de l’Algérie et de l‘Espagne, dont le ministre des affaires étrangères José Manuel Albares sera reçu par le président de la république, M. Abdelmadjid Tebboune.
Arriveront-t-ils à dissiper, lundi prochain, les gros nuages qui ont assombri des relations autrefois exemplaires ?
L.K