Le parquet général français a annoncé, ce mercredi, son opposition à l’extradition de l’ancien ministre algérien de l’Industrie, Abdesselam Bouchouareb, vers l’Algérie.
Celui-ci, établi en France depuis 2019, est poursuivi par la justice algérienne pour des affaires de corruption. La décision du parquet général intervient après plusieurs mois d’examen du dossier par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence.
Les autorités algériennes avaient demandé l’extradition de Bouchouareb, condamné à plusieurs reprises pour des faits de corruption. Cependant, le parquet général français a estimé que les garanties fournies par l’Algérie concernant les conditions de détention de l’ancien ministre étaient insuffisantes.
L’ «argument» sanitaire avancé
Selon les médias français, l’avocat général, Raphaël Sanesi de Gentile, a souligné que l’éloignement de Bouchouareb, pourrait entraîner un déclin rapide et irréversible de son état de santé.
Les autorités algériennes avaient indiqué que Bouchouareb serait incarcéré au centre pénitentiaire d’El-Harrach, à Alger. L’avocat général a exprimé des doutes quant à la possibilité pour l’ancien ministre de “vivre dans de telles conditions”.
Du côté algérien, Anne-Sophie Partaix, représentant les autorités judiciaires, a affirmé que les garanties nécessaires avaient été fournies à la justice française dès le 13 février 2025. Elle a insisté sur le fait que Bouchouareb, accusé d’avoir détourné des fonds publics, devait répondre de ses actes devant la justice algérienne.
« Je ne suis pas un voleur mais un grand industriel … »
L’ancien ministre, qui a dirigé le ministère de l’Industrie et des Mines entre 2014 et 2017 sous la présidence d’Abdelaziz Bouteflika, se présente quant à lui comme une “victime” des purges politiques qui ont suivi la chute du régime Bouteflika en 2019.
Lors de son audition, il a nié les accusations de corruption, se décrivant comme un « grand industriel » et affirmant que ses collègues avaient été “injustement” incarcérés pour avoir simplement appliqué la loi.
La chambre de l’instruction de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence doit rendre sa décision finale le 19 mars. Si elle suit l’avis du parquet général, la procédure d’extradition prendra automatiquement fin.
Contexte politique tendu entre la France et l’Algérie
Cette affaire s’inscrit dans un contexte de relations diplomatiques tendues entre la France et l’Algérie. En effet, les relations entre les deux pays se sont détériorées ces dernières années, notamment après la reconnaissance par la France de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental en 2024.
En réaction, l’Algérie avait rappelé son ambassadeur à Paris et annulé une visite officielle du président Abdelmajid Tebboune.
Les tensions ont été exacerbées par d’autres dossiers sensibles, tels que l’emprisonnement de l’écrivain algéro-français Boualem Sansal et le refoulement de migrants en situation irrégulière, dont l’influenceur algérien Doualemn. Ces incidents ont conduit à des échanges diplomatiques acerbes, avec des menaces de recours à un « rapport de force » de la part du ministre français de l’Intérieur, Bruno Retailleau.
Malgré ces tensions, les relations commerciales entre la France et l’Algérie restent actives. Cependant, le dialogue politique semble au point mort, comme l’a déploré le président Tebboune.
Le 25 février 2025, Paris a décidé de restreindre l’accès au territoire français à certains responsables algériens, une mesure justifiée par la nécessité de « défendre les intérêts des Français ». Cette décision a encore alimenté les frictions entre les deux nations.
Dans ce contexte, le président Macron a appelé à un « dialogue exigeant et respectueux », soulignant que seule une collaboration constructive pourrait permettre de résoudre les différends et de bâtir des relations apaisées entre les deux pays.